EXTRAIT du JIM.FR
Nouveau micmac au conseil de l’Ordre de Paris
Quentin Haroche | 11 Avril 2025
Pour la deuxième fois en un peu plus d’un an, l’élection au conseil de l’Ordre de Paris a été annulée par la justice administrative. La gestion de l’ordre parisien par le Dr Jean-Jacques Avrane est pointée du doigt.
Il y a définitivement quelque chose de pourri au conseil de l’Ordre de Paris, plus grand conseil départemental de l’ordre national des médecins avec plus de 27 000 praticiens représentés. Vendredi dernier, le tribunal administratif de Paris a décidé d’annuler l’élection des membres du conseil de l’ordre parisien, qui s’est tenu le 20 octobre dernier. Le tribunal a jugé l’élection « irrégulière et insincère ».
Une telle décision d’annulation d’élection est déjà exceptionnelle, elle l’est encore plus quand on sait qu’elle ne constitue pas une première pour l’ordre parisien. L’élection annulée du 20 octobre, qui devait renouveler 14 des 28 sièges du conseil de l’Ordre parisien, faisait en effet suite à une autre décision du tribunal administratif de Paris en date du 10 mai dernier, qui déjà avait annulé une première élection des membres du conseil de l’Ordre qui s’était tenue le 11 février 2024.
Bulletins préremplis et médecin empêché de voter
A l’époque, l’élection avait été annulée car le président de l’Ordre parisien, le Dr Jean-Jacques Avrane, avait refusé la candidature d’un certain Dr Stéphane Tala, au motif qu’il était de nationalité camerounaise (en réalité, il était naturalisé français depuis dix ans). Certains supputaient alors que le Dr Avrane souhaitait en réalité empêcher l’élection du binôme du Dr Tala, le Dr Ieva Sliesoraityte, avec qui il serait en conflit.
Cette fois, ce sont de multiples irrégularités dans l’organisation du scrutin qui justifient cette décision du tribunal administratif de Paris. Rappelons tout d’abord que le vote, dont le taux de participation est faible (12 % environ), s’organise par correspondance.
« Cela permet toutes les fraudes possibles pour ceux qui sont déjà en poste » explique au Parisien un médecin candidat « Les élus peuvent voir qui a voté quoi en ouvrant les bulletins, ils peuvent aussi décider de les brûler et les remplacer par un autre qu’ils auront fait eux-mêmes en cochant leurs amis qui se présentent, sans que personne n’en sache rien ».
Et il semble justement que l’équipe dirigeante ait profité de ce système quelque peu archaïque pour frauder. Selon plusieurs témoins, au moins quatre médecins se sont vu remettre des bulletins préremplis et déjà cachetés, ce qui « présente le caractère d’une manœuvre destinée à exercer une pression sur les électeurs » note le tribunal administratif.
Il est également rapporté qu’une praticienne connue pour son opposition au Dr Avrane n’a pas reçu son kit de vote. Au vu du faible écart de voix entre le dernier binôme de candidat élu et le premier non-élu (cinq voix seulement), ces « irrégularités entachant la procédure électorale ont été de nature à affecter la validité des résultats proclamés » conclut le tribunal.
« Deux élections annulées, ça fait tache »
Le juge administratif a ordonné qu’une nouvelle élection ait lieu dans les six mois. En attendant, la moitié des membres du conseil dont le Dr Avrane continue de siéger, plus d’un an après l’expiration de leur mandat.
Afin d’éviter que le nouveau scrutin ne soit de nouveau truqué, Maître Bernard de Froment, avocat des médecins à l’origine de la décision du tribunal a demandé au ministère de la Santé d’ « organiser lui-même la future élection pour qu’elle puisse être fiable ».
« Il y a un climat épouvantable autour de cette élection » commente l’avocat, « il faut voir les pressions qu’ont subies mes clients », dont certains ont préféré se désister au cours de la procédure.
« Je n’ai jamais vu autant de problèmes et aussi graves en une seule élection » poursuit-il. Un médecin interrogé par le Parisien demande même que l’équipe en place soit rendue « inéligible » (une sanction à la mode) en raison de son « pouvoir de nuisance énorme pour l’activité de nombre d’entre nous ».
L’affaire tombe en tout cas mal pour la réputation déjà très altérée du conseil national de l’Ordre des médecins (CNOM), régulièrement pointé du doigt pour des activités financières troubles, pour sa clémence envers les délinquants sexuels ou pour ses décisions disciplinaires très contestables. Interrogé par le Parisien, un membre du conseil national reconnait que « deux élections annulées, ça fait tache ».
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